-
-
- Sur la montagne, Abraham s'apprêtait
à sacrifier son fils Isaac à celui qu'il appelait ELOHIM.
Or celui qui arrêta son geste n'était pas ELOHIM mais : LE
SEIGNEUR (YHWH).
- Il semblerait que pour le rédacteur qui consignait
par écrit ce récit issu d'une tradition très
ancienne, celui qui demandait à Abraham l'immolation de son fils
et celui qui intervenait pour l'en détourner ne cosntituaient
pas une même entité. C'est du moins ce que ces pages
tendent à montrer.
I - LE NOM DIVIN DANS LA TORAH
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A - Elohim et
YHWH
Elohim (en grec Theos
, Dieu) entretient un rapport avec la divinité telle qu'elle
est révérée dans les nations; Elohim c'est le
Créateur de l'univers. El était
vénéré à Ougarit comme le père des
dieux.
YHWH (en
grec kurios, rendu en français par l'Éternel ou Le
Seigneur), est le Nom saint du Dieu d'Israël; Le Nom, ineffable,
ne se prononce pas. Son invocation par le grand-prêtre au Yom
Kippour était vécu comme une manifestation de la
Présence Divine dans le Temple.
Ces deux
dénominations Elohim et YHWH
furent employées dans les écrits de la Torah de
différentes manières:
- Les livres de
Genèse et Exode forment un premier groupe où parce que
le nom Elohim est fréquent, se décèle une
tendance "universaliste". Et c'est au sein de ce monde, que la
Personne même deDieu,YHWH,
s'est révélée à la descendance
d'Abraham.
- Un second groupe,
avec les livres du Lévitique et des Nombres, réserve
l'acte d'adoration à YHWH
seul;le nom Elohim
est absent de ces livres. L'accent est mis sur la pratique des
commandements pour la constitution d'Israël en tant que
peuple.
- Enfin, le Livre du
Deutéronome a comme unifié ces deux tendances en
rassemblant les deux dénominations divines en une seule:
YHWH-Elohenou,
Le Seigneur notre Dieu.
La question est de
savoir à partir de quand YHWH
a été invoqué par les Israélites. A
plusieurs reprises dans la Genèse, la présence
de YHWH
à côté d'Elohim apparaît comme une
insertion qui n'appartenait pas au récit primitif. Il semble
en tous cas que les deux dénominations n'étaient pas
considérées comme équivalentes; ainsi en
témoignerait le récit du Paradis :

B - Un "cas
d'espèce"
ou l'introduction du serpent en Génèse 3:1-5
Avec l'apparition du serpent, était
introduite une différence de nature spirituelle dans les
dénominations du divin :Elohim régit tout le
chapitre premier sur la Création et YHWH -Elohim le chapitre deux; tout
à coup au début du chapitre trois, et pour un court
instant seulement le narrateur revient à Elohim seul, dans le dialogue
entre le serpent et la femme. S'adressant à la femme, le serpent
lui présentait Dieu comme un tyran interdisant de manger de tout
arbre du jardin où il avait placé les humains.
" Elohim a dit: vous ne
mangerez pas de tout arbre du jardin"
Une
phrase sourde, chargée d' ambiguïté.
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Dans le phrasé du serpent
était
placé le nom Elohim, alors qu'au chapitre deux
c'était YHWH -Elohim
qui avait invité l'humain à manger du fruit des arbres;
il lui avait proposé de manger
pour manger de tout
arbre du jardin, en le faisant avec désir (Gn2,16).
Au
mensonge du serpent, la femme rétorquait tout en laissant la
suspicion s'infiltrer en elle:
"Des fruits des arbres du jardin, nous pouvons
manger, quant au fruit de l'arbre qui est au milieu du jardin, Elohim
a dit, vous n'en mangerez pas, vous n'y
toucherez point."
La
femme en se référant à Elohim seul avait
renforcé le commandement en l'étendant à
l'interdit de toucher ou de blesser le fruit. Suite à cette
répartie, le serpent poursuivait en présentant Elohim
comme jaloux de ses prérogatives divines . On sait la suite...
Ce qui intéresse notre propos, c'est de
voir que le rédacteur n'avait apparemment pas voulu inscrire YHWH dans des versets empreints de doute et
de suspicion. Il se serait reporté sur une dénomination
moins sensible, Elohim, préférant ne pas associer
le Nom à des paroles chargées de perfidie.
Ainsi,
il n'avait pas inscrit YHWH
dans
une phrase énonçant une contre-vérité.
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C-
Ha-Elohim
Devant Elohim se
rencontre parfois l'article ha; Ha-Elohim; dans quelle mesure
doit-on en tenir compte? Ni les traducteurs ni les commentateurs
n'en font sentir le caractère spécifique.
Alors?
Analyse Grammaticale
a) - L' article placé devant un
substantif tend à désigner un nom commun; il ne
précédera pas un nom propre. On observera qu'aux ch. 1
à 4 de Gn, le nom Adam est précédé de
l'article, ha-Adam; c'est parce qu'il désigne alors l'homme , le
genre humain, et non un individu précis. Au ch. 5, l'article
disparaît car Adam est alors considéré comme un
individu, un personnage "historique".
Dans cet ordre
d'idée Ha-Elohim ne devrait-il pas être compris ici comme
le divin, plutôt que comme la personne de Dieu?
b)
- Considérant que le terme Ha -Elohim est en hébreu sous
la forme d'un pluriel, l'article n'indiquerait-il pas lui aussi un
pluriel, les dieux ou ces dieux? A cela on
objectera qu'en Gn22,1 le verbe "éprouva" qui suit ha - Elohim,
est au singulier; son sujet n'est donc pas un pluriel. Or il arrive qu'un sujet pluriel soit suivi d'un verbe
au singulier (ex: les eaux, suivi d'un verbe au singulier, Nb 19,13,
24,7).c) -
c) En considérant l'article Ha comme un pronom
équivalent à ce, l'expression tend alors à
distinguer Ha -Elohim dans son contexte
- soit comme Celui que l'on
veut distinguer; par exemple dans le Ps 68/20,21, par l'emploi de ha-El
on veut préciser que Celui dont on parle, c'est le Dieu des
victoires.
- soit comme Celui dont on
vient de parler. (En remontant dans le texte, en 21,33, on trouve le
Seigneur Dieu Éternel).
D - Ha-Elohim et Elohim:
une même identité?
Gn 20/3: " Elohim en songe...lui dit..." Gn 20/6 : "Et lui
dit Ha-Elohim en songe"
Dans ces deux versets, il ne semble pas que le narrateur ait fait de
distinction entre Elohim et Ha-Elohim, mais qu'il établissait
entre eux une stricte équivalence; même remarque si l'on
remonte plus haut en Gn 6/ 9-12. L'article était-il
nécessité ici ou là par une raison grammaticale,
une liaison vocalique commandée par un vav ou par el, ou par un
mot composé ? Dans les expressions similaires des Psaumes
l'article est omis (Ps 53/3, 60/12, 61/1, 68/27, 62/2, 68/16). Alors?
En scrutant le texte, on se rend compte que Celui que priait Abraham,
n'était pas exactement Celui qui l'exauça:
"Abraham intercéda
auprès de Ha-Elohim et Elohim guérit Abimélek".
Gn 20/17.
N'y avait-il pas sagesse du narrateur qui voulait par ce moyen
établir une distance entre D-ieu et la perception qu'en avait
Abraham?
Ha -Elohim,
abréviation de YHWH - Elohim?
L'article Ha devant Elohim, ne serait-il pas une abréviation de
YHWH-Elohim?
Cette explication conviendrait bien en Jonas 4/6-8, dans
l'évolution du dialogue entre le prophète et D-ieu,
appelé successivement YHWH-Elohim, puis Ha-Elohim puis Elohim ,
selon la représentation de plus en plus redoutable que Jonas se
faisait de lui !
Ailleurs, Ha-Elohim est associé à YHWH, mais alors,
l'expression n'a pas le même sens que YHW -Elohim.
- Deutéronome
" Il t'a été montré pour que
tu saches que YHWH , Lui, Ha-Elohim pas d'autre(s) que Lui". Dt 4/35
"Et sache aujourd'hui et réfléchis en ton coeur que YHWH,
Lui, Ha-Elohim dans les cieux ou au-dessus, et sur la terre en dessous,
pas d'autre(s)".Dt 4/39
Ha-Elohim est considéré par l'ensemble des traducteurs
comme se rattachant au Nom divin, dont il serait un
développement, un qualificatif, suivant en cela le Psaume 100/3
qui présente une phrase similaire :
"Sachez que YHWH, Lui Elohim, Lui nous a faits et non pas nous".
Mais l'article fait défaut devant Elohim, et de ce fait la
comparaison ne se justifie qu'en partie. D'ailleurs dans le
Deutéronome, Ha-Elohim peut très bien se relier non point
à YHWH, mais au membre de phrase qui le suit :
"YHWH, Lui; des Élohim, pas d'autres que Lui".
Une lecture que corrobore cet autre verset du Deutéronome 32/39 -
"Voyez, maintenant que Moi, Moi-Lui, et aucun Élohim
auprès de moi".
Dans cette dernière phrase Elohim , sans être
précédé de l'article, est un nom commun signifiant
une divinité, des dieux; aussi Ha-Elohim pourrait parfois, lui
aussi, recouvrir dans les autres livres de la Torah le sens de la
divinité ou "les dieux".
Livres historiques
En 1 S 6/20 , se rencontre l'expression :YHWH, ha-Elohim
le Saint, celui-ci.
Ha-Elohim n'est pas un nom propre, mais plutôt un qualificatif,
comme en Néh 8/6, YHWH, ha-Elohim , le grand .
En 2 Chr 32/16 on pourrait comprendre l'expression comme Le Seigneur
des dieux, sur les lèvres des assyriens , qui maugréaient
contre les dieux de Jérusalem, v. 19.
En Néh 9/7, YHWH ha-Elohim est justement nommé en rappel
d'Abraham.
La dénomination
Ha-Elohim seule, ou rattachée à YHWH, présente une
certaine difficulté de lecture.
Traduire uniformément Ha-Elohim par Dieu risque
d'être inexact. Parfois Ha-Elohim désigne l'entité
divine de manière impersonnelle,
“le divin”, tandis que dans certains cas Ha-Elohim paraît
être une abréviation de YHWH-Elohim.
|
Dans le récit de la ligature d'Isaac,
la langue hébraïque offre trois approches du divin se
concrétisant par trois manières différentes
d'appeler D-ieu :
Elohim, Ha-Elohim, et YHWH .
Sommes-nous devant une seule et même
"réalité spirituelle" ?
1
- Elohim
Interrogé par son fils Isaac sur la victime qui allait
être offerte en sacrifice, Abraham lui répondit v. 8:
" Elohim verra pour lui l'agneau mon fils."
Ainsi en s'apprêtant à immoler son fils, Abraham se
référait à celui qu'il nommait Elohim.
YHWH est Celui qui avait appelé Abraham à sortir d'Ur en
Chaldée. Dans la vie du patriarche, la dénomination
Elohim apparaît tardivement: c'est d'abord El - Puissant (Gn17/1)
qui se manifesta à lui; ensuite Abraham rendit grâce au
El, Très-Haut de Melki-Tsédek,( 14/18,22), et au
El-Éternel reconnu par Avimélek (21/33). Ce n'est qu'avec
la ligature d'Isaac que Elohim semblait intervenir dans la vie
d'Abraham. Elohim , un pluriel en hébreu, rendrait compte de la
pluralité des appellations divines qu'avait connues Abraham lors
de ses pérégrinations parmi les peuples. Or le narrateur
du récit, au premier verset, en écrivant que D-ieu avait
éprouvé Abraham, n'inscrivait pas Élohim, mais...
2 -Ha-Elohim
Qui est-ce qui mit Abraham à
l'épreuve ?
- En Gn22,1 il est écrit "et Ha-Elohim
éprouva Abraham".
Ainsi en insérant en hébreu l'
article, Ha devant Elohim, le rédacteur inscrivait une
différenciation d'avec celui auquel Abraham pensait se
référer, à savoir Elohim.
Ha-Elohim dans le récit de la ligature
d'Isaac est inscrit trois fois, aux v. 1, 3, 9, et toujours dans le
discours indirect.
Ha-Elohim en appelant Abraham, lui disait:
Abraham! Selon le texte hébreu, il ne l'appelait qu'une seule
fois de son nom. La Septante jugera bon de corriger en: Abraham,
Abraham!
Ha-Elohim ajoutait ensuite : "Va pour (vers)
toi...vers la terre de Mori'ah "
Va pour (vers) toi.. se retrouve en
Gn12,1où YHWH appelait Abraham à sortir du lieu où
il était né;va pour toi, constituait alors l'oeuvre
même à accomplir. Reprise ici, si elle n'a pas sa valeur
initiale, peut-être sert-elle d'encouragement?
Abraham devait se rendre sur la terre de
"Mori'ah". En Gn 12,1 il devait se rendre sur la terre que YHWH fait
voir, ou encore , la plaine d'instruction selon le v.12. "Mori'ah"
c'est la montagne où "Instruit-Yh" , selon l'étymologie;
le terme fut pris peu à peu pour un nom géographique.
La fin du récit permet de
découvrir avec l' instruction divine, Celui qui instruit.
3 - YHWH
Abraham qui avait consenti à sacrifier
Isaac à Elohim sur la montagne fut interpellé par le
Seigneur qui l'appelait par l'intermédiaire de son ange, v.11 :
- Abraham, Abraham!
Il faut rappeler ici Ex 3,4, où depuis
le buisson en feu YHWH appelait :
Moïse, Moïse!
La réitération du nom est un
signe de reconnaissance . Quand c'est Le Seigneur qui appelle, il
appelle toujours deux fois. Mais ce n'était pas le cas avec
l'appel fait au v. 1 par Ha-Elohim alors qu'Abraham n'était
nommé qu'une fois.
Le rédacteur identifiait-il Ha- Elohim
et YHWH comme une seule et même personne? de même Ha-Elohim
, et Elohim étaient-ils pour lui équivalents?
- YHWH se fit connaître d'Abraham en se
laissant voir , selon ce qui est dit au v.14; Il se laissait
découvrir en lui-même dans son dessein bienveillant ; YHWH
avait arrêté le geste d'Abraham au moment où il
portait la main sur Isaac. Abraham prit conscience que Celui en qui il
mettait sa foi n'était pas habité d'intentions
inhumaines. C'était bien lui YHWH qui en Gn12 l'avait
invité à se rendre dans le pays qui lui serait
montré. Mais le rédacteur n'a pas écrit que
c'était YHWH , qui avait incité Abraham à lui
offrir un sacrifice sanglant!
En découvrant qui était YHWH
Abraham ne prenait-il pas conscience de la différence existant
entre l'intention divine et celle qu'il lui prêtait? Celle-ci
ressemblait peut-être à celle des dieux d'autrefois...
Traduire Ha-Elohim, et Elohim par une seule
et même dénomination, ne rend pas compte de la
complexité du récit ni de la conscience qui pouvait
habiter son rédacteur. Affirmer que les trois
désignations Ha-Elohim, Elohim et YHWH correspondraient à
une même réalité divine, c'est peut-être ne
pas tenir assez compte de l'écrit et de sa grammaire; c'est
s'engager dans une voie aux multiples ambiguïtés, et offrir
une lecture en "raccourci" , sans un respect suffisant de la
pensée du rédacteur ou de celle des sages.
Tout en prêtant à Ha-Elohim, les
intentions de Elohim, Abraham qui s'apprêtait à immoler
son fils, découvrait en définitive YHWH qui ne demandait
pas le sacrifice sanglant de l'humain. Respecter la
différenciation concourt à ne pas ignorer que l'humain
entre dans une connaissance progressive de Celui qu'il sera en mesure,
peut-être un jour, de reconnaître comme YHWH .
Ha-Élohim offre dans ce récit
les caractéristiques des divinités
révérées par les nations qui poussaient les
fidèles à leur sacrifier leurs enfants. Élohim,
c'était celui que craignait Abraham, avant qu'il ne
découvre l'amour de YHWH .
Craindre,
Voir et Instruire
Ces trois verbes voir, craindre et instruire
présentent en hébreu de telles similitudes, qu' à
certains temps il serait aisé de prendre l'un pour l'autre. Ils
sont chaque fois, dans ce texte, associés à une
dénomination divine.
Sur la demande de ha-Elohim, Abraham se
rendit sur la terre de Mori'ah: v.2 : Ha-Mori-YH = la terre où
instruit YH. Il vit de loin le lieu où il pensait devoir
sacrifier son fils Isaac :
v.4 : Va-Yare'èh ha-makom = et
(Abraham) vit le lieu.
A la question d'Isaac s'interrogeant sur la
victime, Abraham répondit:v.8 : Elohim Yire'èh Lo =
Elohim verra pour lui (pourvoira). Alors qu'il s'apprêtait
à immoler Isaac, YHWH envoya son ange retenir Abraham et le
remercier parce qu'il avait craint Elohim:
v.12 : Yeraè Elohim = tu crains Elohim.
Abraham levant les yeux se rendit compte tout
à coup que la demande divine n'était pas celle qu'il
avait imaginée:
v.13 : Va-Yare'èh = et il vit!
Le verbe qui n'est pas suivi d'un
complément d'objet direct est pris dans un sens absolu: Abraham
se rendit compte! Il se rendit compte que YHWH ne lui demandait pas ce
sacrificesanglant.
C'est pourquoi il dénomma le lieu:
YHWHYire'èh = YHWH verra (ce qui peut se lire aussi "sera
vu")v.14.
Réalisant que YHWH s'était
vraiment manifesté à lui il put s'écrier:
YHWH Yërä'èh = YHWH sera vu
(ou se fait voir, se montre)
Le verbe est directement
précédé ou suivi de la dénomination divine,
sauf au v.13; au v.4 Makom est considéré comme unnom
divin. Abraham pressentait que celui qui l' instruisait allait se faire
connaître. Quand il comprit et qu'il vit ce qui lui était
réellement demandé - ne pas consentir par crainte au
sacrifice sanglant - alors l'instruction et la vision ne firent plus
qu'un:
YHWH se montra, YHWH fut vu d'Abraham.
Somme toute, ce récit avait pour
but d'instruire les fidèles sur les intentions divines: YHWH
n'avait pas à l'encontre des humains de volontés
inhumaines.
Or le récit ne s'arrête pas
là, il y a plus.
Le Bélier
Voyant alors un bélier
pris par les cornes dans un fourré Abraham l'offrit en
holocauste à la place des son fils. Le bélier
représentant les forces instinctives , Abraham consacrait
à Dieu les pulsions qu'il allait devoir apprivoiser.
La paternité d'Abraham
Abraham venait de délier Isaac,
et en le laissant
aller, c'est lui-même qu'il libérait des idées
qu'il se faisait du
dessein divin. Et le narrateur n'a pas dit qu'ils soient rentrés
ensemble.
Abraham avait demandé aux deux
jeunes garçons qui
les avaient accompagnés de les attendre au bas de la montagne,
ajoutant
qu'ils reviendraient ensuite vers eux. En disant cela Abraham exprimait
l'espérance qui l'habitait de ne pas livrer son fils à la
mort, malgré
le sacrifice auquel il consentait. La racine de ce verbe revenir se
retrouve deux fois au v.19 dans un jeu de mots avec revenir, pour se
retourner, se convertir, et aussi pour demeurer.
Et Abraham
retourna vers les deux jeunes garçons;
et ils se levèrent, et allèrent ensemble au puits de la
promesse
(Bersheva); et Abraham demeura au puits de la promesse. |

Rome, catacombes de la via Latina |
Il semblerait qu'en
libérant Isaac de ce qu'il
avait fait peser sur lui, Abraham ait pris conscience d'un devoir de
paternité envers les deux jeunes qui les avaient
accompagnés; c'est
ensemble qu'ils se rendirent à Bersheva, où Abraham resta
après
s'être
retourné.
Le
juste exercice de sa
paternité envers Isaac, le
renoncement à projeter sur lui son dessein personnel, permettait
à
Abraham d'exercer une paternité sur beaucoup d'autres. La
libération d'
Isaac serait ce qui constituait le sacrifice agréé du
Seigneur, source
de bénédiction.
Là
commençait la
promesse:
"je te
bénirai de bénédictions, et je te multiplierai
d'abondance". Gn22,17
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