Les sources scripturaires depuis le Mandylion d'Edesse
au Linceul de Turin
Les marques de la Passion suscitant le respect et la vénération, au
lendemain de la Résurrection, les disciples conservèrent le linceul du
Christ à l'abri des regards et observèrent à son égard le plus complet
silence ; ils le tinrent replié de manière à n'en montrer que la Sainte
Face.
C'est à cette présentation que fait allusion le récit de l'Évangile de
Jean où le linceul disparait au profit d'un suaire recouvrant le visage.
A l'époque de Tatien et de Bardesane alors que le souverain Abgar VIII
était favorable aux Chrétiens, le linceul fut introduit à Édesse pour y
être protégé ; c'est ce que l'on peut déduire de la création d'un
échange épistolaire entre Jésus et Abgar retranscrit par Eusèbe et dont
Égérie eut connaissance.
Un siècle plus tard, les récits mentionnaient un portrait joint à la
lettre.
Au VIIème siècle ce portrait était décrit comme une empreinte sur tissu;
mais ce n'est qu'à Constantinople lors de sa translation que l'évocation
de la plaie au côté vint confirmer que non seulement le visage avait
laissé son empreinte mais le corps tout entier.
Sommaire:
I - Traces dans les Évangiles
II - La lettre d'Abgar d'Edesse
III - Le portrait de Jésus réalisé par un peintre
IV - Une Image non faite de main d'homme
V - Une impression sur tissu réalisée par contact du visage
- Les Actes de Thaddée (fin VIème siècle)
Prise d'Édesse par les musulmans en 639
- Jean Damascène, traité sur les images
- Le discours du patriarche Germain , vers 730
- Le discours du pape Etienne II, en 769
VI - Impression du corps tout entier
VII - Une légende recomposée
L'histoire de l'image d'Édesse de Constantin Porphyrogénète
VIII - Les diverses représentations de la Sainte Face, du VIème au
XIIème siècle
IX - Le Mandylion cède la place à un linceul
Avril 1204 : prise de Constantinople par les Croisés
Les Évangiles
Evangile de Luc : une etoffe de lin
Et après (l') avoir déposé, Joseph
d'Arimathie entoura (ἐνετύλιξεν) le corps de
Jésus dans une étoffe de lin et le mit dans un tombeau
creusé dans le roc où personne encore n'avait été couché. Lc
23:53
Luc a utilisé un verbe rare à la traduction incertaine que Mathieu
considérait comme synonymme du verbe "envelopper" utilisé par Marc:
Evangile de Matthieu : un linceul pur
“Prenant le corps, Joseph l'enveloppa d'un
linceul pur.” Mt 27:59
De la même manière que le tombeau était "nouveau" , Matthieu voulait-il
dire que le linceul n'avait pas non plus servi à autrui, ou bien qu'il
était sans tache? Peut-être se référait-il à l'empreinte laissée sur le
linceul ? Quand Jésus y avait été glissé, le linceul ne comportait
aucune marque ni aucune tâche de sang.
Evangile aux Hébreux
Un tissu précieux que le Seigneur en personne aurait confié à une
personne du milieu sacerdotal :
«Et quand le Seigneur eut donné le
tissu de lin à l'esclave du prêtre, il vint à Jacques se
manifestant à lui. Jacques avait juré qu'il ne mangerait pas de pain
depuis l’heure où il avait bu à la coupe du Seigneur jusqu'à ce
qu'il le vît relevé de ce sommeil”. Et aussi: “Apportez une table et
du pain!” Et immédiatement après: fut apporté du pain qu’il rompit
et bénit, le donnant à Jacques le juste en lui disant: “Mon frère,
mange ton pain parce que le Fils de l'homme s’est relevé du
sommeil”». (Jérôme, Hommes Illustres ch II )
( Texte Latin; Texte
grec )
Jacques le Juste, selon la description d'Hégésippe était un prêtre et
son frère Jude également. Dans sa liste des Douze Apôtres, Marc ne
mentionnait pas Jude mais Thaddée.
Evangile de Jean : Des bandelettes et un suaire
Résurrection de Lazare, Giotto, Assises.
“Et le mort sortit, les pieds et les mains liés de bandes, et le
visage enveloppé d'un linge.” C'est ainsi que Lazare sortit de
son tombeau à l'appel de Jésus.
Si les Hébreux ne pratiquaient pas le mode égyptien de l'embaumement
avec l'extraction des viscères, ils entouraient le corps et les membres
d'épices pris dans des bandelettes qui, en séchant, formaient une
enveloppe protectrice. Le visage était, quant à lui, recouvert d'un
linge indépendant qui pouvait être le
talith du défunt.
Les ossements étaient ensuite placés dans des ossuaires d'albâtre,
parfois sculptés, comme celui du grand-prêtre Caïphe,
ci-contre.
Des épices sont évoquées par Jean dans l'ensevelissement de Jésus:
“Nicodème, qui auparavant était allé de nuit vers
Jésus, vint aussi, apportant un mélange d'environ cent livres de
myrrhe et d'aloès. ils prirent donc le corps de Jésus, et le lièrent
de linges, avec les aromates, comme c'est la coutume d'ensevelir chez
les Juifs. ” Jn 19:38-40
Or, si les relevés d'échantillons de matières sur le linceul de Turin
ont permis d'identifier de nombreuses essences végétales proliférant sur
le pourtour méditerranéen, aucune parcelle de myrrhe ou d'aloès n'a été
mise en évidence jusqu'à ce jour.
Le linceul donnerait donc raison aux Synoptiques selon qui le corps ne
fut pas même lavé de son sang ; il fut couché dans le tombeau enveloppé
dans une pièce de lin. mais sans qu'aucun soin ne lui ait été prodigué.
“Arrive donc Simon Pierre, qui l'accompagnait, et
il entra dans le tombeau et il regarde les linges gisant et le suaire
qui était sur sa tête, non point gisant avec les bandes mais enroulé
séparément dans un lieu unique.” Jn 20 6-7
χωρὶς = sans, est préposition dans tous les emplois du NT dont deux en
Jean. Mais n'étant suivi d'aucun substantif, χωρὶς est ici adverbe et
signifie "séparément" ou “différemment”.
L'étoffe gisait "enroulée différemment“ , puisqu' elle était “sans {le
corps]”. Elle gisait “séparément” des bandes qui , elles, avaient lié le
corps.
Le grec σουδάριον vient du Latin sudor = sueur. Le sudarium est un linge
proche du corps supposé éponger la transpiration. Pour avoir utilisé ce
terme rare de préférence à βύσσος qui apparaît 5 fois dans l'Aocalypse,
l'évangéliste souhaitait-il faire allusion au tissu de lin sur lequel la
sueur du corps de Jésus avait laissé son empreinte ?
Jean a repris pour ce suaire le terme rare dont Luc s'était servi pour
le corps que Joseph d'Arimathie avait
enveloppé d'un linceul;
ce faisant, il lui donnait le sens enroulé, replié. Ce qui avait servi à
envelopper, se trouvait dès lors
replié à part, comme
si les traces laissées par le corps se trouvaient préservées dans les
replis de l'étoffe. Ce verset à la traduction incertaine laisse entendre
que l'étoffe qui avait entouré le visage de Jésus présentait un
caractère particulier.
Il est vraisemblable que le linceul ait été très tôt conservé replié,
s'offrant aux regards comme un simple linge sur lequel apparaissaient
les traits du visage.
G Bellini, Déploration du
Christ

Le
disciple bien-aimé qui était au pied de la croix avait rendu témoignage
sur le sang et l'eau sortant du côté transpercé:
“
mais un des soldats lui perça le côté avec une
lance, et aussitôt il sortit du sang et de l'eau. Celui qui a
vu a rendu témoignage, et son témoignage est vrai.
Et celui-là sait qu'il dit vrai,
afin que vous aussi vous croyiez .” Jn 19:34 -35
Le pronom “celui-là”, avec ἐκεῖνος , a pour fonction de marquer la
différence d'avec le témoin oculaire, ὁ ἑωρακὼς sujet de la phrase
précédente. “Celui-là” représente vraisemblablement l'évangéliste ; s'il
n'avait pas été un témoin direct de la vie de Jésus, par contre il avait
pu voir le linceul avec la tache de sang au côté droit; il avait alors
eu, sous les yeux, la preuve que le témoignage rendu par le disciple
était vrai .
Il faisait le lien entre le témoignage reçu du disciple bien-aimé et le
linceul , soit tel qu'il avait été retrouvé dans le tombeau , soit tel
qu'il était conservé depuis lors et montré avec le visage seul visible.
On comprend que l'évangéliste ait été interpellé par la prophéthie de
Zacharie:
“Ils regarderont vers celui qu'ils ont transpercé” Jn 19:37.
En réponse à cette prophétie Jésus avait laissé son empreinte sur
l'étoffe de lin.
Édesse et l'Osrhoène II -IIIème siècles

Deux manuscrits le codex Curetonianus du Vème siècle et le palimpsest
Sinaïticus sont les deux témoins de la première version des évangiles
en Syriac. Cette traduction, accomplie dans la seconde moitié du
second siècle, donna lieu à des révisions au fur et à mesure où le
texte canonique s'homogénéisait. Elle garde néanmoins l'empreinte du
premier texte des évangiles et peut-être cité sur de nombreux versets
à l'appui du codex Bezæ Cantabrigiensis , au même titre que les
vieilles versions latines.
Vers 172 après la mort de Justin dont il avait été disciple, Tatien
qui était d'origine assyrienne vint s'établir en Osrhoène où il
traduisit en Syriaque une compilation des quatre évangiles appelée
Diatessaron. Il n'y parlait pas de "bandelettes" mais d'un tissu de
lin et d'un suaire (53:17).
A la même époque Bardesane, philosophe et astrologue revint à Edesse
où il avait passé son enfance; il y fut converti au christianisme par
l'évêque Hystaspe en 179 .
Abgar VIII qui avait été son condisciple venait de reprendre le
pouvoir à Edesse et serait devenu lui aussi un croyant à en croire une
allusion de Bardesane dans son livre
des lois et des pays .
La Chronique d'Edesse mentionne lors de l'inondation de 201 la
présence de “l'église des Chrétiens” , montrant que le souverain Abgar
VIII qui régna jusqu'en 212 leur avait été favorable. Une
nouvelle inondation à Édesse en 303 détruisit l'église qui fut
reconstruite entre 313 et 324; elle reçut les reliques de St Thomas
le 22 août 394 .
L' épitaphe
d'Abercius de Hiérapolis datée de 216 et découverte en Phrygie en
1883 fut rédigée dans un langage d'initiés; elle vient confirmer la
présence de fortes communautés chrétiennes dans la principauté
d'Edesse , et à Nisibe en particulier.
«
Citoyen d’une ville distinguée, j’ai fait ce (monument) de mon
vivant, afin d’y avoir un jour une place pour mon corps. Je me
nomme Abercius, je suis disciple d’un chaste berger, qui fait
paître ses troupeaux de brebis sur les montagnes et dans les
plaines, qui a de grands yeux dont le regard atteint partout.
C’est lui qui m’a enseigné les écritures fidèles C’est lui qui m’a
envoyé à Rome contempler la majesté souveraine,et voir une reine
aux vêtements d’or, aux chaussures d’or. Je vis là un peuple qui
porte un sceau brillant. J’ai vu aussi la plaine de Syrie et
toutes les villes, NISIBE, au-delà de l’Euphrate. Partout, j’ai
trouvé des confrères. J’avais PAUL pour compagnon, la foi me
conduisait partout. Partout elle m’a servi en nourriture un
poisson de source, très grand, très pur, pêché par une vierge
immaculée. Elle le donnait sans cesse à manger aux amis ; elle
possède un vin délicieux qu’elle donne avec le pain. J’ai fait
inscrire ces choses chez moi, Abercius, à l’âge de 72 ans. Que le
confrère qui les comprend prie pour Abercius. On ne doit pas
mettre un autre tombeau au-dessus du mien, sous peine d’amende :
2000 pièces d’or pour le fisc romain, et 1000 pour ma chère patrie
Hiérapolis. »
Trad. française par J. QUASTEN, Initiation aux Pères de l’Eglise, 1955,
t.1, p. 193-195).
C'est probablement sous Abgar VIII que le linceul fut acheminé vers
Édesse pour y être préservé. La légende d'Abgar créée à cette époque
témoigne de l'introduction dans la ville d'un “document” lié à la
personne de Jésus.
EUSEBE DE CESAREE: Histoire Ecclésiastique
“Légende d'Abgar ” 1.13.1-22
«Quant
a l'histoire de Thaddée, en voici le récit : La divinité de notre
Seigneur et Sauveur Jésus Christ ayant été proclamée parmi tous les
hommes, à cause de sa puissance thaumaturgique, amena de grandes
multitudes d'entre eux, même des régions étrangères les plus
éloignées de la Judée, avec l'espoir qu'ils seraient guéris des
maladies et des souffrances de toutes sortes. Le roi Abgar qui
régnait d'une manière très distinguée sur les nations d'au delà de
l'Euphrate, était alors consumé par de terribles souffrances
corporelles, incurables, du moins selon la puissance humaine.
Lorsqu'il apprit le nom illustre de Jésus et ses miracles
unanimement attestés par tous, il devint son suppliant et lui fit
porter une lettre, pour lui demander la délivrance de son mal.
Celui-ci n'obéit pas alors à son appel, mais il l'honora
d'une lettre particulière, lui promettant d'envoyer un de
ses disciples pour guérir sa maladie et pour le sauver avec tous ses
sujets.
La promesse fut accomplie pour le roi peu de temps après. En effet,
après que Jésus fut ressuscité des morts et monté aux cieux, Thomas,
un des douze Apôtres, envoya à Edesse par un mouvement divin,
Thaddée qui était, lui aussi, compté au nombre des soixante-dix
disciples du Christ, comme héraut et évangéliste de la doctrine sur
le Christ : par lui toutes les promesses de notre Sauveur reçurent
leur accomplissement. On a de cela le témoignage écrit, emprunté aux
archives d'Edesse qui était alors une ville royale : c'est en effet
dans les documents publics du pays, qui contiennent les actes
anciens et ceux du temps d'Abgar, que l'on trouve cette histoire
conservée depuis lors jusqu'à présent. Il n'y a rien de tel que de
prendre connaissance des lettres elles-mêmes empruntées par nous aux
archives et traduites littéralement du syriaque en ces termes. Copie
de la lettre écrite par le toparque Abgar à Jésus et à lui envoyée
par le courrier Ananias à Jérusalem.
Lettre d'Abgar
" Abgar, fils d'Ouchamas, toparque, à Jésus
bon Sauveur manifesté au pays de Jérusalem, Salut. " J'ai entendu
parler de toi et de tes guérisons, que tu accomplirais sans
remèdes ni plantes. A ce qu'on dit, tu fais voir les aveugles et
marcher les boiteux; tu purifies les lépreux ; tu chasses les
esprits impurs et les démons, tu guéris ceux qui sont frappés de
longues maladies, tu ressuscites les morts. Ayant entendu tout
cela à ton sujet, je me suis mis dans l'esprit que de deux choses
l'une : ou bien tu es Dieu, et, descendu du ciel, tu fais ces
merveilles; ou tu es le fils de Dieu faisant ces merveilles. C'est
pourquoi donc, je t'écris maintenant et je te demande de prendre
la peine de venir à moi et de guérir l'infirmité que j'ai. Car
j'ai encore appris que les Juifs murmurent contre toi et te
veulent du mal. Ma ville est très petite, mais honorable et elle
nous suffira à tous deux."
Telle est la lettre écrite par Abgar qu'éclairait alors quelque peu
la lumière divine. Il vaut la peine d'écouter la lettre que lui
écrivit Jésus et qui lui fut apportée par le même courrier, courte
sans doute mais pleine de sens : en voici également le texte :
Réponse de Jésus par le courrier Ananias au toparque Abgar.
Lettre de Jesus
" Heureux es-tu d'avoir cru en moi, sans
m'avoir vu. Car il est écrit de moi que ceux qui m'ont vu ne
croiront pas en moi, afin que ceux qui ne m'ont pas vu croient et
vivent. Quant à ce que tu m'écris de venir à toi, il faut que
j'accomplisse ici tout ce pour quoi j'ai été envoyé et qu'après
l'avoir ainsi accompli, je retourne à celui qui m'a envoyé. Et
lorsque j'aurai été élevé, je t'enverrai un de mes disciples pour
te guérir de ton infirmité et te donner la vie, à toi et à ceux
qui sont avec toi. "
A ces lettres était encore joint ceci, en langue syriaque : " Après
l'ascension de Jésus, Judas, qu'on appelle aussi Thomas, envoya à
Abgar l'apôtre Thaddée, un des soixante-dix. A son arrivée, celui-ci
demeura chez Tobie, fils de Tobie. Lorsqu'on entendit parler de lui,
on signifia à Abgar qu'un apôtre de Jésus était là, selon qu'il
l'avait promis. Thaddée avait donc commencé à guérir toute maladie
et toute langueur par la puissance de Dieu, de sorte que tous en
étaient étonnés. Et lorsque Abgar apprit les merveilles et les
miracles qu'il faisait, les guérisons qu'il accomplissait, il lui
vint à la pensée qu'il était celui dont Jésus lui avait écrit :
Lorsque j'aurai été élevé, je t'enverrai un de mes disciples qui
guérira tes souffrances. Il appela donc Tobie, chez qui demeurait
l'apôtre, et lui dit :
- J'ai appris qu'un homme puissant est venu
habiter dans ta maison. Amène-le moi.
Tobie, revenu auprès de Thaddée, lui dit : le toparque Abgar, après
m'avoir appelé, m'a dit de t'amener auprès de lui pour que tu le
guérisses. Et Thaddée répliqua :
- J'irai, puisque je suis envoyé avec
puissance auprès de lui. "
Le lendemain donc, au point du jour, Tobie prit avec lui Thaddée et
vint près d'Abgar. Lorsqu'il entra, les principaux du pays étaient
là, debout autour du toparque. Dès son arrivée, Abgar vit subitement
un grand spectacle sur le visage de l'apôtre Thaddée; et à cette
vue, Abgar adora Thaddée, ce qui étonna tous les assistants car ils
n'avaient pas vu le spectacle qui s'était manifesté au seul Abgar.
Celui-ci demanda à Thaddée : Es-tu en vérité disciple de Jésus, le
fils de Dieu, qui m'a dit : Je t'enverrai un de mes disciples qui te
guérira et te donnera la vie ? Thaddée dit : Puisque tu as cru
fortement en celui qui m'a envoyé, c'est pour cela que j'ai été
envoyé près de toi. Et maintenant si tu crois en lui, les demandes
de ton cœur seront réalisées pour toi comme tu auras cru.
Et Abgar lui répondit :
- J'ai cru en lui tellement que j'aurais
voulu prendre une armée et détruire les Juifs qui l'ont crucifié,
si je n'en avais pas été empêché par l'empire romain.
Et Thaddée dit :
- Notre Seigneur a accompli la volonté de
son Père; et, après l'avoir accomplie, il est retourné auprès du
Père. Abgar lui dit :
- Et moi aussi j'ai cru en lui et en son Père.
Et Thaddée dit :
- A cause de cela, j'étends la main sur toi en son nom.
Lorsqu'il l'eut fait, aussitôt le roi fut guéri de sa maladie et des
souffrances qu'il éprouvait. Abgar admira que, selon qu'il avait
entendu dire de Jésus, de même il l'avait éprouvé en fait par le
moyen de son disciple Thaddée : celui-ci l'avait guéri sans remèdes
ni plantes; et non seulement lui, mais encore Abdos, fils d'Abdos,
qui était podagre. Ce dernier lui aussi, étant venu, se jeta aux
pieds de Thaddée, obtint ses prières et fut guéri par sa main.
Thaddée guérit encore beaucoup d'autres de leurs concitoyens, fit de
grands miracles et prêcha la parole de Dieu. "
Après cela, Abgar dit : Toi, Thaddée, tu fais cela avec la puissance
de Dieu et nous- mêmes en sommes dans l'étonnement. Mais avec cela,
je t'en supplie, renseigne-moi sur la venue de Jésus, comment elle
s'est produite, et sur sa puissance, par quelle puissance il a fait
tout ce que j'ai entendu dire. Et Thaddée répondit : Pour l'instant,
je me tairai; mais puisque j'ai été envoyé pour prêcher la parole,
assemble-moi demain tous tes concitoyens; je leur prêcherai et je
sèmerai en eux la parole de la vie , sur la venue de Jésus, comment
elle s'est produite, sur sa mission, pourquoi il a été envoyé par le
Père; sur sa puissance, ses œuvres, les mystères qu'il a enseignés
dans le monde : par quelle puissance il agissait ainsi; sur la
nouveauté de son message, sa faiblesse, son humiliation : comment il
s'est humilié lui-même, comment il a déposé et rapetissé sa
divinité, comment il a été crucifié, est descendu aux enfers, a
brisé la barrière qui n'avait jamais été brisée, a ressuscité les
morts et, après être descendu seul, est remonté avec une grande
multitude auprès de son Père.
Abgar ordonna donc de rassembler dès l'aurore ses concitoyens pour
entendre la prédication de Thaddée; et après cela, il ordonna qu'on
lui donnât de l'or, en pièces et en lingots. Celui-ci refusa en
disant : “Si nous avons abandonné nos biens
propres, comment accepterons- nous ceux des autres ? Cela se passa
en l'an 340. "
Voilà ce qu'il ne m'a pas semblé inutile et inopportun de rapporter
ici, et qui a été traduit littéralement du syriaque .»
Voyage d'Ethérie (Égérie) en 384
Éthérie, Journal de voyage (Sources Chretiennes 296,
208-213.
Structure près de la ville d'Harran (Urfa /Edesse)
«
J'ai voulu, selon la volonté de Dieu, aller en Mésopotamie de Syrie,
pour voir les saints moines qu'on disait très nombreux dans cette
région et d'une vie admirable au-delà de toute expression. J'y
allais aussi pour prier au martyrium de l'apôtre Saint Thomas, où
son corps entier a été déposé, à Edesse. C'est ce saint que devait
envoyer là, quand il serait monté aux cieux, Jésus notre Dieu, selon
qu'il l' avait promis dans la lettre qu'il envoya au roi Abgar par
le courrier Ananias et qui est conservée avec un grand respect dans
la ville d'Édesse où se trouve ce martyrium Que votre charité
veuille bien m'en croire, il n'y a pas un chrétien qui ne s'y rende
pour prier, Parmi ceux qui sont venus aux Lieux saints à Jérusalem;
c'est à partir de Jérusalem à la 25ème étape »
Édesse.
“ En plusieurs étapes, je suis arrivée dans une ville dont nous
lisons le nom cité dans les Écritures : c'est Batanis qui subsiste
encore aujourd'hui. Car il y a là une église avec un évêque fort
saint, moine et confesseur ainsi que plusieurs martyria. Cette ville
d'ailleurs regorge de population, car des troupes y sont en garnison
avec leur tribun. Repartant de là, nous sommes arrivés au nom du
Christ notre Dieu à Édesse. Dès notre arrivée, nous nous sommes
rendus aussitôt à l'église et au martyrium de saint Thomas . Ainsi
donc, après avoir, selon notre coutume, fait des prières et tout ce
que nous avions l'habitude de faire dans les lieux saints, nous y
avons lu aussi quelques textes relatifs à saint Thomas. L'église qui
est là est grande, très belle, nouvellement bâtie, vraiment digne
d'être la maison de Dieu ; et comme il y avait là beaucoup de choses
que je désirais voir,
Harran, près d'Urfa
j'ai dû y faire trois jours de halte. J'ai donc vu dans cette ville
un grand nombre de martyria et aussi de saints moines qui habitaient
les uns près des martyria, les autres assez loin de la ville, dans
des endroits écartés où ils avaient leurs ermitages. Le saint évêque
de cette ville, un homme vraiment pieux, moine et confesseur,
m'accueillant avec bonté me dit : «Puisque je vois, ma fille, que,
par piété, vous vous êtes imposé une si grande fatigue, de venir du
bout du monde jusqu'à ces lieux, si vous l'avez pour agréable, tous
les endroits qui font plaisir à voir ici à des chrétiens, nous
allons vous les montrer. » Alors, rendant grâces à Dieu d'abord,
puis à lui, je lui ai demandé instamment de daigner faire ce qu'il
disait.
Statue du roi Abgar
Il m'a donc conduite d'abord au palais du roi Abgar , et, là, il m'a
montré une statue originale du roi, parfaitement ressemblante,
d'après ce qu'on disait ; elle est de marbre, aussi brillante que si
elle était de perles ; on voyait sur le visage de cet Abgar, rien
qu'à le regarder, que c'était un homme vraiment sage et plein
d'honneur. Alors le saint évêque me dit : « Voilà le roi Abgar qui,
avant de voir le Seigneur,(qui antequam videret
Dominum) a cru qu'il était vraiment le fils de Dieu. » II y avait
aussi, auprès, une autre statue semblable, faite du même marbre,
dont il me dit que c'était celle de son fils Magnus (Ma'nou) ; lui
aussi a de même quelque chose de sympathique dans le visage.
Puis, nous sommes entrés à l'intérieur du palais ; il y avait là
des fontaines pleines de poissons, telles que je n'en ai encore
jamais vu, tant elles étaient grandes, tant leurs eaux étaient
limpides et bonnes au goût. La ville n'a absolument pas d'autre
eau actuellement que celle-là qui sort du palais , .et qui est
comme un grand fleuve d'argent. Alors le "saint évêque m'a raconte
l'histoire de cette eau, en ces termes : « C'était quelque temps
après que le roi Abgar avait écrit au Seigneur et que le Seigneur
ait répondu à Abgar par le courrier Ananias , comme il est écrit
dans la lettre ; au bout donc de quelque temps, les Perses
surviennent et encerclent la ville. Mais aussitôt Abgar,
apportant la lettre du Seigneur à la porte de la ville, avec toute
son armée, lit une prière publique. Puis il dit ensuite :
« Seigneur Jésus, tu nous avais promis que jamais un ennemi
n'entrerait dans la ville, et voici qu'en ce moment les Perses nous
attaquent . »
Quand le roi eut ainsi parlé tenant dans ses mains levées la lettre
ouverte, tout à coup il se fit une grande obscurité, mais en dehors
de la ville, pour les Perses qui déjà approchaient si près de la
ville qu'ils n'en étaient plus qu'au 3e mille. Mais alors
l'obscurité jeta tellement le trouble parmi eux que c'est à peine
s'ils purent établir leur camp et encercler la ville au 3e mille
tout autour. Ce trouble fut tel que jamais les Perses ne virent
ensuite de quel côté entrer dans la ville, mais ils la gardèrent
investie d'ennemis tout autour, au 3e mille, et ils la gardèrent
ainsi pendant plusieurs mois.
Dans la suite, voyant qu'ils ne pouvaient en aucune façon entrer
dans la ville, ils voulurent faire mourir de soif ceux qui s'y
trouvaient. Or ce petit monticule que vous voyez, ma fille, dominant
la ville, en ce temps-là, c'était lui qui fournissait l'eau à la
ville. Alors voyant cela, les Perses détournèrent cette eau de la
ville et la firent dériver vers l'endroit où ils avaient établi leur
camp. Or, au jour et à l'heure où les Perses avaient détourné l'eau,
sur le champ, ces fontaines, que vous voyez ici, jaillirent d'un
seul coup, sur l'ordre de Dieu ; depuis ce jour jusqu'à maintenant,
elles continuent de couler ici, grâce à Dieu. Quant à l'eau que les
Perses avaient détournée, elle s'est tarie à l'heure même, si bien
qu'il n'y a même pas eu un seul jour de quoi boire pour ceux qui
assiégeaient la ville, comme il apparaît aujourd'hui encore, car
dans la suite jamais aucune sorte d'eau n'y a paru jusqu'à
maintenant.
Et alors, selon la volonté de Dieu, qui avait promis qu'il en serait
ainsi, ils ont été obligés de rentrer sur le champ chez eux,
c'est-à-dire en Perse. Et dans la suite, chaque fois que des ennemis
ont voulu venir attaquer notre ville, on a apporté la lettre et on
l'a lue à la porte; et sur le champ, confor- mément à la volonté de
Dieu, tous les ennemis ont été repousses.» Le saint évêquenous a
raconté encore ceci : « A l'endroit où ces fontaines ont jailli, il
y avait auparavant une plaine, à l'intérieur de la ville, au pied du
palais d'Abgar. Ce palais d'Abgar était situé à une certaine
hauteur, comme on s'en rend compte encore maintenant, vous le voyez.
Car c'était la cou- tume en ce temps-là, quand on construisait des
palais, de les faire toujours sur des hauteurs 1. Mais une fois que
ces fontaines eurent jailli à cet endroit, alors Abgar fit faire
pour son fils Magnus (Ma'nou), celui dont vous voyez la statue
placée à côté de celle de son père, le palais qui est ici, mais de
manière que ces fontaines soient encloses dans le palais. »
Après m'avoir raconté tout cela le saint évêque me dit: «Allons
maintenant à la porte par laquelle est entré le
courrier Ananias avec la lettre dont j'ai parlé.»
Quand nous sommes arrivés à la porte, l'évêque debout a fait une
prière et nous a lu les lettres, puis nous bénissant, il a refait
une seconde prière. Le saint évêque nous a raconté encore quelque
chose, c'est que, depuis le jour où le courrier Ananias était entré
par cette porte avec la lettre du Seigneur jusqu'à nos jours, la
porte est gardée, pour éviter qu'aucun homme impur, aucun
homme en deuil ne passe par cette porte, et que le corps d'aucun
mort ne sorte par là. Le saint évêque nous a montré aussi
le tombeau d'Abgar et de toute sa famille ; il est très beau, mais
fait à la mode d'autrefois. Il nous a conduits aussi au palais d'en
haut, qu'avait eu en premier lieu le roi Abgar, et tous les autres
endroits à voir, il nous les a montrés. Il y a aussi une chose qui
m'a fait grand plaisir, c'est que ces lettres, aussi bien celle
d'Abgar au Seigneur que celle du Seigneur à Abgar, que le saint
évêque nous avait lues là, m'ont été remises par lui. J'avais beau
en avoir des copies dans ma patrie, j'ai mieux aimé pourtant prendre
celles qu'il m'offrait, craignant que le texte ne nous soit parvenu
un peu moins complet dans notre patrie, car il y en a sûrement
davantage dans celui que j'ai reçu ici1. Si donc Jésus notre Dieu le
veut et si je reviens dans notre patrie, vous le lirez vous aussi,
mes bien chères dames.»
“La Guerre des Perses de Procope”
- Procope, La guerre des Perses II, 12, publiée en 552,
“ L'ambition de prendre la ville d'Edesse
s'empara de Chosroes . Il y avait été conduit par le dire des
chrétiens, qui lui hantait l'esprit, qu'elle ne pouvait être
prise, et ce pour la raison suivante....
[récit de la vie d'Abgar]
Lorsque le Christ vit ce message, il fit une réponse à Abgar,
disant clairement qu'il ne viendrait pas, mais lui promettant la
santé dans la lettre. Et on dit qu'il avait ajouté aussi que
jamais la ville ne serait susceptible d'être prise par les
Barbares. Cette dernière partie de la lettre était entièrement
inconnue de ceux qui en écrivirent l'histoire à l'époque, car il
n'y en avait aucune mention nulle part; mais les gens d'Édesse
dirent qu'ils l'avaient trouvée avec la lettre, si bien qu'ils
avaient fait en sorte que la lettre soit gravée ainsi sur les
portes de la ville à la place de toute autre défense.
En fait quelques temps après, la ville fut soumise aux Mèdes non
après un siège mais de la manière suivante...Et la pensée m'est
venue que, si le Christ n'avait pas écrit ce que j'ai raconté,
puisque les gens en sont venus à y croire , Il tient, pour cette
raison, à garder la ville imprenable...
Lorsque Chosroes atteignit les environs d'Édesse, ils témoignèrent
que son visage suppurait et que sa mâchoire avait enflé. Pour
cette raison, il était peu disposé à faire une tentative contre la
ville, mais il a envoyé Paul exiger de l'argent de la part des
citoyens. Ils répondirent qu'ils n'avaient absolument aucune
crainte concernant la ville, mais pour qu'il n' endommage pas le
pays , ils acceptèrent de donner deux centenaria d'or. Et Chosroes
prit l'argent agréant l'accord.“
Le Portrait de Jésus
Doctrine d'AddaI : un portrait de Jesus
Le
manuscrit syriaque de Saint-Pétersbourg (ve siècle ?) , contient une
autre version de la légende d'Abgar , appelée Doctrine d’Addaï :
elle est plus développée que le texte d'Eusèbe, et que celui remis à
Égérie.
A noter ces points qui ne sont pas chez Eusèbe :
– L’un des envoyés du roi Abgar à Jérusalem fait un portrait de
Jésus :
«Lorsque Hannan, le détenteur des archives,
vit que Jésus parlait ainsi, comme il était lele peintre du roi, il
peignit un portrait de Jésus faisant choix des
couleurs, et l'apporta à Abgar, le roi, son maître. Et quand le
roi Abgar, vit le portrait, il le reçut avec une
grande joie, et le plaça avec grand honneur dans l'un de ses
palais ». (Addai 13)
– Addaï fait le récit de la découverte, l’invention de la Croix par
Protonice.
– Abgar le roi et Tibère l’empereur échangent au sujet des Juifs des
lettres dont le texte est donné.
– La Doctrine d’Addaï comprend aussi un long développement contre
l’idolâtrie.
– Elle montre l’admiration du roi pour Aggaï, le successeur d’Addaï.
Texte
en Anglais
“Une image non faite de main d'homme”
- Une hymne liturgique en langue syriaque décrit les splendeurs de
l’église cathédrale de la ville. Elle vante l’éclat du marbre,
"semblable à l’image qui-non par-mains". Le début de l'hymne
mentionne les reconstructeurs de l'église après une inondation
catastrophique en 525. (cf.A
M Dubarle)
Evagre
Histoire Ecclésiastique 594-600
CHAPITRE XXVII.
Siège
d'Edesse par CHOSROES.
Il en va de même de Procope qui raconte ce que les anciens avaient
rapporté concernant Édesse et Abgar, et comment le Christ lui
avait écrit une lettre. Il a ensuite raconté comment Chosroes se
déploya pour assiéger la ville, pensant faire mentir l'assertion
répandue parmi les fidèles, que Édesse ne tomberait jamais au
pouvoir de l'ennemi, affirmation, toutefois, qui ne figure pas
dans ce qui avait été écrit à l'intention d'Abgar par le Christ
notre Dieu; de même que l'analyse qui peut être recueillie de
l'Histoire d'Eusebe de Pamphilie, qui cite l'épître mot pour mot.
Telle est, cependant, l'affirmation et la conviction des fidèles;
cela fut ensuite accompli, portant à la foi dans la réalisation
des prédictions. Car après que Chosroes ait entrepris différents
assauts contre la ville, dressé un monticule d'une hauteur
suffisante pour dépasser les murs de la ville, eu recours à
d'innombrables expédients, il leva le siège et se retira. Je vais,
néanmoins, entrer dans les détails. Chosroes a ordonné à ses
troupes de recueillir une grande quantité de bois pour le siège,
quel que soit le bois tombé sur leur chemin; et quand cela fut
fait,avant que l'ordre ne soit donné de l'arranger en cercle, il
jeta un monticule entre lui et la ville . De cette façon, en l'
élevant peu à peu avec le bois et la terre, et en le poussant en
avant vers la ville, il le porta à un hauteur suffisante pour
surplomber le rempart, de sorte que les assiégeants pouvaient
lancer leurs missiles contre les défenseurs. Lorsque les assiégés
virent la butte approcher des remparts comme une montagne qui se
déplaçait, alors que l'ennemi était en attente de renforts pendant
la journée de pause, ils conçurent de faire une tranchée sous la
butte - selon le terme Latin "aggestus" - et par là de mettre le
feu, de sorte que la combustion du bois cause la chute de la
butte. La tranchée fut achevée, mais ils échouèrent en essayant
d'enflammer le bois parce que le feu qui ne trouvait pas de voie
pour un apport supplémentaire d'air, ne put s'en emparer. Dans cet
état de totale perplexité, ils apportèrent l'image formée
divinement, non faite par les mains humaines, mais
Christ, notre Dieu , envoyé à Abgar qui avait été désireux de le
voir. Finalement, après avoir présenté cette sainte image dans la
tranchée, et l'avoir inondée, ils en arrosèrent le bois; et la
puissance divine immédiatement avec la foi de ceux qui étaient
présents le résultat fut obtenu qui était impossible auparavant:
le bois fut immédiatement pris par les flammes et en un instant
réduit en cendres, et l' incendie se propagea dans toutes les
directions....
l'empreinte du visage sur un linge
Jean DamascEne
décrivait le portrait de Jésus comme une empreinte laissée sur un un
drap oblong, qui n'était pas carré.
“ un récit nous est parvenu par une ancienne tradition, je veux
parler d'Abgar, souverain d'Edesse. Enflammé d'amour divin par la
renommée du Seigneur, il envoya des messagers pour demander sa
visite. Au cas où il s'y refuserait, il ordonna à un peintre
d'exécuter son portrait. Sachant cela, celui qui connaît tout et
peut tout, prit le tissu et le posa sur son visage ; il y
imprima sa propre physionomie. Tout cela est conservé jusqu'à
maintenant ".
Reprise dans son Traité des images (750) :
" Abgar régnait sur la ville d'Edesse ; il envoya un peintre pour
tracer l'image ressemblante du Seigneur; comme le peintre ne le
pouvait pas en raison de l'éclat resplendissant du visage, le
Seigneur lui-même appliqua un vêtement à son propre visage divin
et vivifiant, il y imprima sa représentation, et
il l'envoya à Abgar qui la désirait "
Texte
en Anglais
Les Actes de Thaddée,
furent écrits au temps de l'empereur Héraclius, plus
particulièrement entre l'entrée de celui-ci à Constantinople en
629 et la Pâque 630.
«Et Ananias, après s'en être allé et avoir
donné la lettre, ne put Le fixer dans son esprit.
Et Il (Jésus) le sut pour connaître les coeurs et demanda à se
laver et un suaire lui fut donné. Et quand il se fut
lavé il essuya son visage avec et son image y laissant son
empreinte il le donna à Ananias»
Codex Vossianus
Le
Codex Vossianus du Xème siècle, provenant de la bibliothèque de
Gerhard Johann Vossius et exhumé par Gino Zaninotto de la
Bibliothèque Vaticane, présente la citation d'un homme du nom de
Smera vivant à Constantinople au VIIIème siècle et selon qui ,
dans une église d'Edesse on pouvait voir l'empreinte du corps tout
entier sur lelinge remis à Agbar:
"Le roi Abgar recut un tissu sur lequel on pouvait voir
non seulement un visage mais le corps tout entier [non
tantum] faciei figuram sed totius corporis figuram cernere
poteris).
Codex Vossianus, Latinus Q69 (Codex 5696, fol.35, Pietro Savio,
Ricerche storiche sulla Santa Sindone Turin 1957).Ricerche
storiche sulla Santa Sindone Turin 1957)
Homélie de Grégoire le Référendaire
Homélie
de Grégoire le Référendaire prononcée lors de la translation du
mandylion d'Édesse à Constantinople en 944
cf G- ZANINOTTO, "Orazione di Gregorio il
Referendario in occasione della traslazione a Costantinopoli
dell'imagine Édessena nelle'anno 944", dans "La Sindone,
Indagini scientifiche", Edizioni Paoline, 1988, pp. 344-352.
(Travaux du congrès national de Syracuse en 1987).
Codex Vossianus Latinus Q 69 et Codex de la bibliothèque vaticane
5696.
Extrait de la Trad. en
Français de A.-M. DUBARLE
Revue des études byzantines 1997, vol. 55, pp. 5-51 :
«Nous ferons couler du
sein des fleuves d'eau vive. Si nous le voulons maintenant, cela
se réalisera aussitôt, si nous considérons de quelles beautés
est dépeint le resplendissement surnaturel. Car les (moyens)
grâce auxquels la peinture forme les images, ouvrant à
l'intelligence une porte pour concevoir le modèle, n'ont pas
peint également le resplendissement . L'une, d'un côté, avec des
couleurs variées d'une beauté éclatante, compose la plénitude de
la forme...Par contre, le (resplendissement) a été imprimé par
les seules sueurs d'agonie du visage du Prince de la Vie , qui
ont coulé comme des caillots de sang , et par le doigt de Dieu.
Ce sont elles (les sueurs) les ornements qui ont coloré
l'empreinte véritable du Christ. Et l'(empreinte), depuis
qu'elles ont coulé, a été embellie par les gouttes de son propre
côté .
Les deux (choses) sont pleines
d'enseignements: ici sang et eau, là sueur et figure.
Quelle égalité des réalités, car elles (proviennent) d'un seul
et même (être). Mais on voit aussi la source d'eau vive et elle
abreuve en enseignant que les sueurs réalisatrices d'image, que
fait couler le flanc de la nature (commune) à chacun, l'ont
formée (I'empreinte). (La source) est comme une fontaine faisant
couler des ruisseaux comme à partir d'orifices qui arrosent
l'arbre de vie , en se divisant en deux bras. L'un (des bras)
dessine celui qui est à la fois Dieu et homme, d'une part en
produisant de manière extraordinaire une réalité exceptionnelle
et surhumaine, d'autre part en composant une figure
circonscrite, conforme à l'homme. L'autre (bras de la source)
prescrit par un discours intérieur de quelles couleurs il faut
orner la (créature) qui est à l'image et à la ressemblance (de
Dieu. En effet il réalise lui-même que le modèle soit amené à la
ressemblance par les sueurs de la forme qu'il a daigné
porter. Par un exemple vraiment digne de Dieu, il
ordonne que l'image spirituelle qui est en nous, que nous avons
reçue dans un don bienfaisant par le souffle initial et
vivifiant, ne soit pas dessinée de l'extérieur. Car lui non plus
n'a pas (dessiné de l'extérieur) sa propre (image), mais par ce
qui nous (appartient), par les sueurs de la (nature) qui
lui est unie, comme par des couleurs naturelles.
Quelles sont les (couleurs naturelles) qui nous appartiennent ?
La pureté, I'impassibilité, I'éloignement de tout mal et ce qui
est de cette sorte. C'est par cela que se forme la ressemblance
au divin.»
Texte en Anglais trad Mark Guscin .