12 - Femme tu es
délivrée de ton
infirmité.
La préposition qui vient en
renfort du préfixe est dans le style lucanien. Ell n'est
pas indispensable et son absence n'a pas d'effet sur le sens.
Le verbe à la voix passive
est au parfait. Faut-il le lire dans sa valeur d'aspect comme un
plein accomplissement, ou bien comme le résultat d'une
action ancienne? C'est au parfait que Luc a transcrit ces verbes
sensibles à travers lesquels Jésus disait l'oeuvre
de Dieu: Tes péchés ont été remis
(5,21; 7,47); il vous a été donné de
connaître les mystères (8,10); vous avez
été guéris (17,14 D05). Indiquait-il par
ce moyen la perfection des actions divines (valeur d'aspect) ou
bien projetait-il cette action dans le temps divin (valeur de
temps)? Tous ces verbes étant transitifs, on sera enclin
à considérer la valeur temporelle du parfait,
dès l'aube de la création tout ayant
été donné aux humains.
19 - Et elle devint arbre et les
oiseaux du ciel se sont reposés sous ses
rameaux.
[ et elle est devenue un
grand arbre...dans ses branches]
Tableau
réaliste, dans le codex Bezae, de la parabole de la graine de moutarde ; celle-ci
donne des arbustes qui n'atteignent certainement pas la taille
d'un grand arbre. et dont les branches sont constituées de
rameaux sous lesquels les oiseaux viennent chercher de l'ombre;
ils ne sauraient se reposer parmi eux ou sur eux car ces rameaux
sont souples et fragiles.
Que représente la graine de
moutarde devenue arbuste: la parole qui fructifie dans le coeur?
Que représentent les oiseaux: le monde de l'Invisible qui
se rend présent à l'humanité?
20 - *** [
à nouveau il dit ].
Il n'y a pas dans le codex de
Bèze cette phrase de séparation, car les paraboles
s'enchaînent.
22 - Jérusalem
Le nom de la ville est ici dans son
écriture courante à l'époque de Jésus,
un calque de l'araméen adopté dès les livres
de Daniel et d'Ezra. Par contre Hyérosolyma un neutre
pluriel, choisi dans les autres manuscrits, est rare. En
référence à Tb 1,4, serait
caractérisé par ce vocable le Lieu choisi par Dieu
pour les offrandes et les sacrifices, le Temple lui-même.
Hyérosolyma ne se rencontre que deux fois en Luc dans le
codex de Bèze (2,22 et 23,7). C'est dans ces deux
circonstances là seulement qu'il y a notification d'un
sacrifice: les tourterelles pour la purification de la femme
accouchée, et l'agneau pascal. Deux autres orthographes du
nom de la ville sainte, propres au codex de Bèze se lisent
en Lc 23,28 et 24,13.
27 Je ne vous ai jamais vus;
éloignez-vous de moi, tous ouvriers de la violation de la
Loi.
La phrase est inspirée du
Psaume 6,9, où ἀνομία,
sans -Loi, rappelle la loi Mosaïque; Justin
connaissait le verset sous
cette forme. Dans
un contexte héllénistique où l'on se
distançait du judaïsme, cette référence
n'étant plus souhaitée, lui fut
préférée un terme plus
générique,ἀδικία,
injustice.
31 - Hérode cherche à
te tuer.
[Hérode veut te tuer.
]
Hérode étudiait les
moyens d'attenter à la personne de Jésus. Ce
n'était pas seulement un désir abstrait mais le
début d'un manoeuvre que Jésus dénoncera
à mots couverts lors de la Cène (22,22).
Hérode le meurtrier de Jean n'était pas, comme on le
lit souvent, peu dangereux ou inoffensif. Jésus le
comparait au renard dont la duplicité avait
été illustrée par Esope dans ses fables; dans
les livres bibliques le renard exprimait davantage la couardise
(Neh 4:3; 2 Esdr 13:35 LXX; Ezek 13:4 ; Lam 5:18; 1 Enoch 89:10,
42-49, 55;Midrash Rabbah 2.15.1 ). Seul Luc a reconnu son rôle dans la crucifixion (Lc 23:12, Ac 4:27)
32 - Et je m'acquitte de
guérisons aujourd'hui et demain, et au troisième
(jour) je me consacre.
Les deux verbes sont au
présent de la voix moyenne. τελειοῦμαι
avec ses composés, est réservé dans le codex
de Bèze à la personne de Jésus (cf.note sur
2,6 et21); ce verbe
accompagne la consécration du grand-prêtre Aaron et
de ses fils(LXX, Ex 29,9, Lv8,33);. La parole quelque peu obscure,
prononcée par Jésus, pourrait être une
allusion à la consécration sacerdotale du
grand-prêtre). L'auteur
de la Lettre aux Hébreux a développé cette thématique:
Mais pourquoi Jésus aurait-il demandé de rapporter une telle parole à Antipas?
Est-ce parce qu’il
revêtirait Jésus d’un manteau
éclatant (23:11), image du manteau sacerdotal?
La transcription latine n'a pas suivi
le grec mais offre la leçon commune avec la forme prophetam :
Seulement il me faut
aujourd'hui et demain et le (jour) suivant, marcher, parce qu'il
ne convient pas qu'un prophète soit perdu en dehors de
Jérusalem - Jérusalem Jérusalem...
Etait
proposée une nouvelle annonce de Jésus sur sa
Passion : comme prophète, il ne pouvait se permettre de
mourir en dehors de Jérusalem. Mais comme il n'y a aucun
verset biblique auquel rattacher cette
nécessité, la phrase serait plutôt
à prendre sur le ton de l'ironie: comment
mourrait-il en dehors de Jérusalem, la meurtrière
des prophètes?
35 - Voici que vous est
laissée votre Maison déserte.
L'adjectif “déserte” serait-il
un ajout en provenance de Matthieu? (cf Mt 23,38 et 24,15). La Maison
bâtie par les hommes pour Dieu, c'était le Temple;
les mots détenaient une allusion à la
Présence divine dans le Saint des Saints, qui allait s'en
retirer le laissant désert, ce que pourrait symboliser le
déchirement du voile (Lc 23, 46). L'abandon du Temple, est
un thème prophétique; avec Jérémie,
l'annonce se faisait menace de destruction ( Jr12,7, 22,5). La
désertification étant une conséquence de la
ruine, on aurait considéré ce verset comme la
première annonce de la destruction de Jérusalem. Or
sans le terme désert, la phrase revêt un sens qui
n'implique nullement la ruine. Jésus s'approchant de
Jérusalem n'y serait pas entré (peut-être
parce qu'Hérode s'y serait trouvé), et il se serait
contenté d'annoncer son retour.
13:35 : Vous ne me verrez plus
jusqu'à ce que revienne lorsque vous dites.
"Béni le venant au nom du Seigneur".
[Vous ne me verrez plus
jusqu'à ce que vous dites: "Béni le venant au nom du
Seigneur"].
- Jésus parlait d'un moment
habituel de la liturgie qui revenait périodiquement, celui
où serait chanté "le venant dans le Nom du
Seigneur", cette acclamation du Psaume 118(17),26 appartenait au
Hallel, psalmodié lors des fêtes de
pèlerinage, principalement à Pessa'h. A cette
occasion en effet, entrant à Jérusalem sur un
ânon, quelques mois plus tard, il allait être
acclamé de cette salutation par ses disciples (19,38).
Le verbe ἤξει (futur de ἥκω) est pris dans le sens de “revenir”(et non point "venir"). En effet c'est le sens donné dans les quatre autres emplois
de cet évangile (12,46, 13,29, 15,27, 19,43) à ce verbe
absent des Actes. Jésus n'avait pas prononcé une
prophétie eschatologique des temps derniers, mais une
annonce de l'accueil qui allait lui être
réservé lors de sa prochaine entrée à
Jérusalem. Cela se passait après les fêtes
d'automne (puique la transfiguration au ch.9 évoquait le
Kipour avec la préparation des Tentes) et quelques mois
avant Pessa'h. Les éléments nombreux qui rythment la
chronologie lucanienne demandent à ne pas être
intervertis. Ainsi entre cette annonce et le moment où il
allait être acclamé roi, Jésus n'allait plus
revenir à Jérusalem.